Karl Marx 1818 - 1883
Grâce à son analyse de la société industrialisée et capitaliste, Karl Marx a mis en évidence l’existence de classes sociales, groupements d’individus partageant des intérets communs.
Les deux principales classes sont la bourgeoisie capitaliste : personnes disposant du capital et propriétaires des moyens de productions, qui ont donc le pouvoir d’embaucher les prolétaires : personnes n’ayant que leur force de travail et qui sont exploitées et dominées économiquement par les bourgeois.
Ces deux classes opposées et irréductibles constituent une approche bipolaire de la société.
Marx distingue donc une classe sociale grâce à trois critères : sa place dans les rapports de production (« en soi »), le sentiment d’appartenance à un groupe ayant des intérets communs ou conscience de classe (« pour soi ») et les rapports conflictuels qu’elle entretient avec les autres classes.
Enfin, Marx élabore son analyse selon une démarche holiste d’après laquelle le comportement des individus est défini par la société. Son approche est réaliste car les groupes sociaux qu’il étudie existent réellement. L’analyse de Marx s’appuie donc sur un constat.
Max Weber 1864 - 1920
L’analyse de Weber est multidimensionnelle. Il existe, selon lui, trois hiérarchies fonctionnant selon leur propre logique mais également toutes liées. On parle alors d’ordres : économique ( classes sociales définies selon la richesse), social (groupes de statut fondés sur le prestige) et politique (partis politiques hiérarchisés grâce au pouvoir).
Ainsi, pour Weber, il est tout à fait possible d’avoir une position élevée sur une échelle et basse sur une autre.
Ce sociologue perçoit la société en strates qui sont des groupes d’individus ayant des caractéristiques communes. Un individu est donc situé dans la société grâce à trois critères : économique, social et politique.
Weber rejette l’idée que les classes sociales sont forcément en conflit. Elles peuvent l’être mais ce n’est pas ce qui les définit, d’après lui.
Weber établit donc des strates sociales grâce à des analyses individualistes. L’individu fait des choix de manière rationnelle et la société résulte donc de l’addition de tous les comportements personnels des individus. L’analyse Weberienne de la société est de nature nominaliste car les ordres qu’il établit ne sont pas réels. Ils ont été créés par Weber dans le but d’étudier les phénomènes sociaux.
Pierre Bourdieu 1930-2002
La conception de Pierre Bourdieu constitue une forme de synthèse entre les points de vue de Marx (classe sociale) et de Weber (stratification sociale).
Bourdieu considère que les rapports de domination (capacité d’un groupe à faire reconnaitre ses pratiques sociales comme légitimes par les autres groupes) entre les classes dépassent la sphère économique pour concerner les différentes sphères sociales, et en particulier la sphère culturelle en insistant sur les notions de prestige et d’influence (ce qui fondait la description des statuts et des partis chez Weber).
Les classes sociales se distinguent selon Bourdieu par leur dotation inégale en capitaux économiques, sociaux et culturels utilisés ensuite dans différents champs (domaine dans lequel des agents entrent en concurrence pour tirer des avantages matériels et symboliques) où s’expriment les rapports de force, d’influence et de pouvoir.
Le capital économique est le patrimoine (biens mobiliers et immobiliers) qu’un individu cherche à valoriser parce qu’il lui procure des avantages matériels.
Le capital culturel comprend l’habitus, les biens culturels et les diplômes.
Le capital social est l’ensemble des relations sociales qu’un individu peut mobiliser.
Le capital symbolique résulte des trois premiers. Le prestige social assure la légitimité des pratiques de l’agent.
Selon Bourdieu, une classe sociale est un ensemble d’agents caractérisé par le volume global de ses capitaux économique et culturel, mais aussi la structure (répartition) de cet ensemble entre les deux capitaux retenus et finalement des pratiques sociales proches.
A partir de cette définition, il distingue trois grandes classes dont chacune est liée à la possession des capitaux, à des habitus et des styles de vie spécifiques :
- La classe dominante qui est la classe composée de l’ensemble des agents fortement dotés en capitaux et dont les pratiques sont légitimes. La classe dominante cherche à imposer son modèle culturel et sa vision du monde aux autres classes par le biais de pratiques de distinction, pour cela elle doit contrôler les institutions productrices de légitimité comme l’école ou l’État.
- Les classes moyennes qui sont des classes dominées dont les membres aspirent à des pratiques légitimes.
- Les classes populaires qui sont l’ensemble des agents faiblement dotés en capitaux et dont les pratiques reflètent l’intériorisation des contraintes sociales qui pèsent sur eux.
Ces contraintes sont d’ordre économique mais surtout culturel puisque ces agents adoptent pour l’essentiel une conception de l’ordre social qui est celle de la classe dominante et qui délégitime par avance leurs éventuelles aspirations.
Ce qui distingue les classes sociales entre elles ne se réduit donc pas à la richesse.
C’est donc une approche multidimensionnelle de la classe qui est développée. Entre ces classes le conflit n’est pas une nécessité mais il existe bien des rapports de domination et des luttes, notamment pour le contrôle du capital culturel, enjeu majeur selon Bourdieu.
Tableau