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Gorges Balandier

Georges Balandier

1 PRÉSENTATION

Balandier, Georges (1920- ), anthropologue et sociologue français, dont les études ont contribué à constituer l’ethnologie comme discipline, à renouveler l’approche des sociétés africaines contemporaines et à développer la réflexion sur la complexité et l’évolution des relations sociales dans le monde actuel.

2 LE MAÎTRE DE L’AFRICANISME FRANCOPHONE

Né à Aillevillers, Georges Balandier étudie les lettres et la philosophie avant de rejoindre la Résistance. Au sortir de la guerre, il travaille au musée de l’Homme auprès de Michel Leiris. Dès 1947, il publie Tous comptes faits, sorte de roman-bilan écrit à seulement vingt-cinq ans avec la nécessité de se « vouloir neuf, sans reliquat de [ses] erreurs passées, seul avec toute [sa] chance ». De 1946 à 1948, il effectue son premier terrain au Sénégal, où il partage la vie de famille du fondateur de la revue Présence africaine, Alioune Diop, et se lie d’amitié avec Léopold Sédar Senghor. Il se rend par la suite en Guinée et au Congo. Pour ce futur universitaire, l’Afrique sera sa « véritable Sorbonne ».
Nommé en 1954 directeur d’études à l’École pratique des hautes études en sciences sociales, Georges Balandier fonde le Centre d’études africaines. Proche d’Alfred Sauvy, il forge avec lui en 1956 le terme de « tiers-monde ». Critiquant le colonialisme, il préconise une décolonisation progressive et concertée. Lié aux acteurs des indépendances africaines, il vit avec engagement les difficultés de ces pays à utiliser leur nouvelle liberté et à prendre la voie de la démocratie.
En 1962, il est nommé professeur à l’École normale supérieure, puis à la Sorbonne, où il inaugure la première chaire de sociologie africaine. En 1965, il prend la direction des Cahiers internationaux de sociologie fondés par Georges Gurvitch.

2.1 Le promoteur de l’anthropologie dynamique

De ses terrains et recherches sur les sociétés traditionnelles de l’Afrique noire, Georges Balandier tire Sociologie actuelle de l’Afrique noire (1955), Sociologie des Brazzavilles noires (1955), Afrique ambiguë (1957), la Vie quotidienne au royaume de Kongo du XVIe au XVIIIe siècle (1965), puis l’Anthropologie politique (1967), où il se penche sur les mécanismes du pouvoir et met en lumière la connivence entre le pouvoir et le sacré.
Ses travaux portent sur les rapports réels, dissimulés par les structures apparentes, qui animent les dynamiques sociales. Il rejette le structuralisme qui ne permet pas de rendre compte, comme il le montre dans Anthropo-logique (1974), du mouvement perpétuel de toute société. Étudiant par la suite les sociétés occidentales, il soutient, dans Sens et Puissance (1971), que la démocratie ne peut se limiter au contrôle du pouvoir par le suffrage universel et qu’elle implique la participation du plus grand nombre possible d’acteurs sociaux à l’élaboration des grandes options politiques.

3 LE THÉORICIEN DE LA SURMODERNITÉ

Poursuivant l’analyse des mécanismes anthropologiques à l’œuvre dans les sociétés, Georges Balandier montre dans le Désordre. Éloge du mouvement (1988) que le manque d’organisation suscite trois types de réponse de la part des groupes humains : soit une tentative de structuration rigide et totalitaire ; soit l’instauration de valeurs sacrées qui ont pour fonction de canaliser les aspirations sociales, comme l’histoire en fournit de nombreux exemples avec les théocraties ; soit une recherche d’équilibre par la mise en mouvement de différents groupes sociaux. Cette dynamique, qui défait l’ordre et les structures stériles, entraîne inéluctablement une phase de perte des repères. Avec le Détour. Pouvoir et modernité (1985), le Dédale. Pour en finir avec le XXe siècle (1994), le Grand Système (2001) et le Grand Dérangement (2005), le Désordre s’inscrit dans une série d’ouvrages éclairant les grandes mutations du monde contemporain et permettant de dégager un fil conducteur dans la complexité des sociétés modernes à travers la grille d’analyse de la « surmodernité ».
Georges Balandier, dont l’œuvre est devenue une référence, est également l’auteur de Civilisés, dit-on (2003), recueil de textes inédits et de contributions diverses retraçant son parcours intellectuel et éclairant les interrogations propres à l’époque actuelle. À l’heure de la mondialisation, de l’économisme et des avancées des sciences et techniques, il entend donner à l’anthropologie actuelle la tâche d’explorer les nouveaux univers nés de cette conjoncture — qu’il baptise les « nouveaux Nouveaux mondes ». Georges Balandier constate en effet que « ces univers sont des sources de puissance qui n’ont jamais été pensées », avec les nombreux risques (technologiques et « civilisationnels ») qui en découlent à l’échelle planétaire. Et de regretter que la puissance de la société actuelle, qui tend à se couper du passé, ne s’accompagne pas d’une capacité civilisatrice et d’une vision quant à l’avenir, notamment au sein des leaders politiques.

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