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Classe sociale

classes sociales

1 PRÉSENTATION
classes sociales, en sociologie, concept qui désigne des strates sociales qui composent la société.
2 UNE NOTION TARDIVEMENT FORMULÉE
La notion de classe sociale apparaît, en tant que telle, relativement tard dans le vocabulaire de la sociologie. Cela ne signifie pas pour autant que le concept, avant de pouvoir être formalisé n’avait pas d’existence. Si pour de nombreux sociologues, dont Georges Gurvitch par exemple, la notion de classe est étroitement liée à l’apparition des sociétés industrielles, on peut néanmoins observer que certaines sociétés préindustrielles sont organisées selon un système de castes, particulièrement rigide qui établissent des distinctions selon l’état ou la distinction de statut qui peut exister entre les différents groupes sociaux. Cette organisation fait ressortir divers éléments qui permettent de structurer la société en différentes classes : la façon dont elles se constituent, les activités de ses membres, la réglementation du mariage entre individus, ou encore les droits et devoirs rituels qui incombent à ceux-ci par rapport aux autres strates de la population, permettent d’établir des hiérarchies entre individus. La vie à l’intérieur de ces groupes, de ces classes, obéit à des principes de régulation spécifique. Ils peuvent être d’ordre religieux, d’ordre légal ou relever de la sanction sociale.
3 UNE PREMIÈRE APPROCHE TERMINOLOGIQUE : KARL MARX
Cette forme de stratification que représente la classe sociale apparaît au grand jour avec les débuts de l’industrialisation. Karl Marx a fait œuvre de pionnier en matière de terminologie.
Marx rattache la terminologie qui est la sienne, à une théorie de l’histoire qui fait de la satisfaction des intérêts matériels le principal moteur de l’action humaine et explique le devenir des sociétés. Pour cet auteur, une classe sociale rassemble un groupe d’individus qui occupe une place définie au sein du processus de production. Cette place est d’abord déterminée selon un critère technique qui est prolongé par un critère d’ordre juridique. Ceci l’amène à individualiser et à caractériser sous le terme de classe ceux qui tirent leurs revenus du travail et qui perçoivent un salaire, de ceux qui possèdent l’outil de production qui sont rémunérés par le profit. Cette distinction le conduit à reconnaître à titre principal deux classes sociales : la bourgeoisie, détentrice des moyens de production, et le prolétariat, qui, ne possédant que sa seule force de travail, est contraint de se mettre au service des titulaires des moyens de production.
À titre principal, ce sont donc deux classes sociales qui structurent le corps social. Pourtant Marx lui-même, dans certains de ses écrits, notamment dans la Lutte des classes en France distingue plusieurs groupes qu’il appelle classes sociales. Au sein de la bourgeoisie, il recense l’existence d’une bourgeoisie financière, industrielle et commerçante, puis il fait état d’une classe paysanne, d’une classe prolétarienne et enfin ce qu’il nomme le lumpenprolétariat qui constitue au sein de la classe ouvrière la classe la plus miséreuse.
Toutefois, la contradiction n’est qu’apparente. L’existence de différents groupes au sein d’une société, et plus précisément dans la société capitaliste que Marx analyse, ne saurait se confondre avec la notion de classe sociale. Chez Marx, la classe s’identifie au groupe qui, par son action agit sur l’évolution des sociétés. Pour lui, le sens de l’histoire se résume à une dialectique qui oppose la classe possédante à celle qui aspire à la possession. Cette lutte des classes qui émerge à l’époque contemporaine est, à ses yeux, le prolongement moderne de la lutte opposant l’homme libre à l’esclave, ou encore le serf au seigneur sous le régime féodal. La nouveauté de l’analyse marxiste consiste en l’introduction d’un nouvel élément déterminant pour la compréhension de la notion : constitue véritablement une classe sociale le groupe animé d’une conscience d’appartenance à une classe et conscient de ce qui le sépare des autres classes. C’est ce sentiment qui permet à un groupe d’agir dans le but de renverser cet ordre, et donc précisément d’agir sur l’évolution politique des sociétés.
4 LES DÉVELOPPEMENTS POSTÉRIEURS DE L’ANALYSE MARXISTE
La notion de classe ne se confond donc pas avec une simple stratification sociale. Cette idée importante contenue dans l’analyse marxiste est reprise par d’autres auteurs qui ont tenté d’enrichir la notion tout en s’écartant de certains postulats avancés par l’auteur du Capital. Ainsi pour Max Weber, la conscience de classe si chère à Marx ne constitue pas l’élément fédérateur de celle-ci. Il distingue pour sa part trois « ordres » susceptibles de caractériser une classe. L’ordre économique, l’ordre social et l’ordre politique caractérisent à ses yeux ce qu’il appelle une situation de classe. L’ordre économique rejoint l’analyse marxiste et prend pour élément fédérateur la place occupée au sein de l’appareil productif, même si cette place ne se définit pas obligatoirement en termes de propriété et de non-propriété. L’ordre social confère quant à lui le prestige : il est lié à la possession de la fortune et découle du premier ordre. Le dernier élément correspond au degré d’autonomie et de maîtrise du fait politique.
Les analyses postérieures ont toutes, à un degré ou à un autre, emprunté à ces théories fondatrices. La notion a toutefois évolué, notamment sous l’effet de la sociologie américaine qui s’est moins attachée à développer une conception théorique de la notion, que de développer des études empiriques. À la notion de classe, il est devenu courant d’assimiler celle de strate, voire même celle de catégorie socioprofessionnelle. Ces deux dernières notions seraient plus à même de rendre compte de l’aspect évolutif de la notion. Alors que la notion de classe rend compte de l’antagonisme qui existe entre celles-ci une fois qu’elles sont clairement identifiées, elle ne suffit pas à caractériser l’évolution contemporaine des sociétés industrielles.
Cette approche pragmatique se nourrit de l’idée que nul n’est condamné à l’appartenance à une classe sociale qui régulerait l’ensemble de son existence. L’existence d’une mobilité sociale ascendante qui veut que « les fils auront davantage que leurs pères », fondée sur le mérite et non plus seulement sur le critère déterminant de la possession, plaide pour une appréhension nouvelle de la notion de classe.
Ce type d’argumentation, que l’on peut contester en relevant l’ensemble des facteurs qui invitent à prendre conscience d’un mouvement de reproduction sociale entre les générations (que ce soit au niveau de la transmission du patrimoine, de la reproduction des pratiques culturelles ou scolaires, jusqu’aux inégalités face aux usages sociaux du temps) a néanmoins le mérite de donner à la notion un caractère dynamique qu’elle n’avait pas ou peu jusqu’à présent, tout en soulignant la richesse de ce concept protéiforme.

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