Alfred Reginald Radcliffe-Brown
1PRÉSENTATION
Radcliffe-Brown (1881-1955), anthropologue britannique, chef de file modéré du fonctionnalisme.
Alfred Radcliffe-Brown est l’artisan de l’évolution décisive de l’anthropologie britannique, et contribue notamment à fonder l’anthropologie sociale avec Evans-Pritchard. Pédagogue réputé et conférencier brillant, il a également formé une grande partie des anthropologues de son époque.
2UN PROFESSEUR GLOBE-TROTTER
Né à Birmingham (en Angleterre), Alfred Reginald Radcliffe-Brown étudie l’anthropologie à l’université d’Oxford (Trinity College) puis de Cambridge. Il part entre 1906 et 1908 effectuer une enquête de terrain dans les îles Andaman (alors colonies britanniques), puis étudie les Aborigènes d’Australie occidentale (1910-1913). Il publie les résultats de ses enquêtes dans The Andaman Islanders (« les habitants des îles Andaman », 1922) et The Social Organization of Australian Tribes (« l’organisation sociale des tribus australiennes », 1931). Après un bref mais fructueux retour à Birmingham, où il donne des conférences très suivies en anthropologie sociale, il poursuit sa carrière à l’étranger, d’abord comme directeur de l’éducation dans le royaume de Tonga en Polynésie britannique (1916), puis à la chaire d’anthropologie du Cap (Union sud-africaine) de 1921 à 1925. Il retourne en Australie pour organiser le département d’anthropologie de l’université de Sidney, où il enseigne de 1926 à 1931, puis part enseigner en Chine, à l’université Yenching (Pékin), de 1931 à 1937.
Enfin, de retour en Angleterre, il occupe jusqu’à sa retraite, en 1946, le premier poste de professeur d’anthropologie sociale à l’université d’Oxford — durant les années de guerre, il est détaché deux ans à l’université de São Paulo. Mais la retraite n’arrête guère ses activités de pédagogue, et c’est ainsi qu’il continue à enseigner en Égypte (Alexandrie, 1947-1949), en Afrique du Sud (Grahamstown, 1951-1954), puis à Manchester et à Londres. Couvert d’honneurs académiques et professionnels, président du Royal Anthropologic Institute et de l’Association of British Social Anthropologists, il est un artisan infatigable de la promotion de sa discipline.
3UN FONCTIONNALISTE MODÉRÉ
Au début du XXe siècle, l’anthropologie est marquée par le courant évolutionniste, le diffusionnisme et l’historicisme, et l’introduction de la psychologie. Radcliffe-Brown se construit théoriquement en opposition à ces trois propositions théoriques, radicalement au début de sa carrière, mais de manière plus modérée à la fin de sa vie, reconnaissant notamment l’apport de l’histoire dans la compréhension des institutions, et celui de la psychologie dans la compréhension du fonctionnement de l’individu. À la suite de Bronislaw Malinowski, auquel on l’associe souvent, il est partisan d’un fonctionnalisme modéré.
Convaincu que les systèmes sociaux sont naturels, Radcliffe-Brown entreprend d’élaborer une nouvelle théorie des sciences sociales — une « science naturelle et théorique de la société » —, basée sur l’analogie entre organismes biologiques et systèmes sociaux. Il s’appuie pour cela sur les travaux du philosophe britannique Herbert Spencer et sur l’œuvre du sociologue français Émile Durkheim, partisan de l’utilisation de méthodes scientifiques pour l’étude des sociétés. Les deux monographies de Radcliffe-Brown, ainsi que les articles réunis dans Structure et fonction dans la société primitive (Structure and Function in the Primitive Society, 1952) et Method in Social Anthropology (« méthodes de l’anthropologie sociale », 1958) tentent ainsi de constituer cette science.
L’œuvre théorique de Radcliffe-Brown, ainsi que sa pratique de terrain, est violemment attaquée de son vivant, puis tombe dans l’oubli. Néanmoins, Radcliffe-Brown a exercé une influence considérable sur l’anthropologie britannique, et a formé un nombre important d’anthropologues dans le monde entier.