Accéder au contenu principal

Mondialisation

mondialisation

1 PRÉSENTATION
mondialisation, mouvement d’internationalisation des économies et des sociétés induit par le développement des échanges dans le monde. On dit aussi « globalisation » (de l’anglais globalization).
La mondialisation traduit l’extension géographique des échanges, mais également l’extension du domaine de ces échanges : la mondialisation ne concerne plus seulement les marchandises, mais englobe les capitaux, la main-d’œuvre, les services, la propriété intellectuelle, les œuvres d’art. Le rôle des sociétés multinationales dans ce processus est déterminant, car elles apparaissent comme les principaux acteurs de cette internationalisation des relations économiques et culturelles, en particulier par les acquisitions et fusions qu’elles opèrent. Ce constat ne doit cependant pas conduire à négliger le poids des modifications institutionnelles qui ont accompagné ou favorisé ce mouvement. Les analystes mettent également en avant les progrès techniques intervenus dans le domaine des transports et des communications. Jusqu’à un certain point, cette mondialisation ne constitue que le prolongement de l’ouverture des économies que l’on observe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cependant, les mutations de l’organisation internationale qu’elle engendre depuis les années 1990 ont fait franchir une nouvelle étape à l’interdépendance des économies et des sociétés du monde.
2 LA MONDIALISATION : ACTUALITÉ D’UN PHÉNOMÈNE ANCIEN
Les historiens signalent plusieurs phases dans le phénomène d’internationalisation de l’économie mondiale, depuis la période d’ouverture des échanges avec le commerce au long cours et la conquête coloniale (XVIe siècle). Chaque phase est marquée par des progrès techniques dans la navigation maritime puis aérienne, le développement des télécommunications couplé à l’informatique (marine à voile, à vapeur, train à grande vitesse, télégramme, téléphone, Internet…). Les volumes de marchandises échangés et de données transmises ont été à chaque phase multipliés d’un facteur élevé et la croissance des échanges a systématiquement dépassé la croissance de la production intérieure : entre 1990 et 1998 le commerce mondial a « explosé » en augmentant de 55 p. 100. La mondialisation financière a aussi progressé de façon spectaculaire en raison de l’accroissement rapide des flux de capitaux (investissements directs ou de portefeuille) et du développement des bourses de valeurs, dont une bonne partie des transactions se fait désormais « en ligne », c’est-à-dire à peu près en temps réel (immédiateté de la transmission de l’ordre). Enfin, dans la dernière phase, la mondialisation semble se déplacer vers le domaine de la vie courante, affecter les modes de vie et les œuvres de l’esprit, par une mise en relation directe des parties du monde en un même moment et la possibilité d’interactivité. Ce phénomène, dynamique, souvent exalté par le discours suggestif de certains entrepreneurs, ou de certains journalistes se prête à des extrapolations vers un futur rêvé plus que réel.
3 LE POIDS DES SYMBOLES : LA COMPRESSION DU TEMPS ET DE L’ESPACE
L’accumulation rapide des nouvelles, certaines terribles (guerres, catastrophes…), la multiplication de l’offre de consommation informatique, mais aussi ludique, sportive, artistique, donne une impression d’accélération du temps, déjà signalée par Paul Valéry, mais répétée par beaucoup d’analystes de la mondialisation. Dans le domaine des relations internationales, certains ont pu de même prévoir avec la mise entre parenthèses des frontières, la « fin des territoires » (Bertrand Badie), parce qu’ils pensent que l’Etat-nation est définitivement dépassé et que la référence spatiale (territoriale) traditionnelle est en voie d’être remplacée par des réseaux supranationaux ou infranationaux. Ces représentations, même si elles ont probablement exagérées, ne sont pas sans intérêt. Les symboles ne sont pas à négliger, car ils expliquent, pour une large part, la nature du débat — qui n’est pas seulement d’ordre économique, mais également politique et idéologique — qui se cristallise autour de cette notion de mondialisation, tantôt présentée comme une panacée capable de résoudre les problèmes du monde, tantôt comme un spectre menaçant les emplois, engendrant les crises et touchant gravement à la souveraineté des peuples et des nations.
Pour relativiser cette notion de l’accélération du temps et de l’annihilation de l’espace géographique, il n’est que de constater l’hétérogénéité des niveaux économiques et techniques à la surface du globe, citer les chiffres de la Banque mondiale sur l’étendue de la pauvreté et bien signaler que les phénomènes exacerbés de compression de « l’espace-temps » ne sont valides que pour une toute petite partie de l’espace développé, et encore, parmi cet ensemble, seulement pour des secteurs restreints (société politique, monde de la haute finance, monde de l’art, recherche de pointe…). Par ailleurs, l’annonce de la suppression des frontières est pour le moins prématurée.
4 LA MONDIALISATION ET SES CONTRADICTIONS
4.1 La mondialisation : facteur de croissance pour les économies industrielles.
La libéralisation des échanges commerciaux est en constante progression au niveau mondial depuis 1945 et a été à l’origine des taux de croissance importants qu’ont connus la plupart des pays industrialisés pendant la période dite des Trente Glorieuses (malgré quelques alertes au protectionnisme et quelques « guerres commerciales » limitées).
L’institution du General Agreement on Tariffs and Trade (GATT) devenu en 1994 l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a été le principal instrument de libéralisation du commerce mondial. La croissance du volume des échanges a dynamisé les économies des pays participants, et entraîné la croissance des industries manufacturières de production. Les années 1960 et 1970 ont ainsi constitué une période de forte ouverture des marchés vers l’extérieur et de mondialisation qui s’est accompagnée de taux de chômage très bas.
Bien plus, ce multilatéralisme des échanges s’est accompagné d’une intégration régionale des marchés, qui s’est opérée dans le respect des règles du GATT. La création de la Communauté économique européenne, qui deviendra l’Union européenne (UE), une union douanière devenue une union économique et monétaire, reposait sur un fondement clair : constituer un vaste marché susceptible d’offrir de nouveaux débouchés aux entreprises européennes. Plus récemment, la constitution de vastes zones de libre-échange est venue structurer le commerce mondial dans quelques régions du monde : l’Alena associe les États-Unis, le Mexique et le Canada et le Mercosur quatre pays du continent sud-américain, dont le vaste Brésil. La dynamique de ce type d’intégration a également eu des effets bénéfiques en termes de croissance dont nul ne vient contester le bien-fondé. Enfin, les sociétés multinationales sont dans l’ensemble favorables à cette ouverture des marchés, parce que cela leur permet de faire des économies d’échelle et de rationaliser leurs investissements (souvent au prix de restructurations et de réductions d’effectifs).
4.2 Le cas de la France
Si l’on examine le seul cas français, il apparaît que le pays a profité largement des effets de la mondialisation. La France reste le quatrième exportateur mondial et jouit d’un excédent positif de ses échanges. Le niveau des importations rapporté au produit intérieur brut (PIB) n’a que peu progressé dans les deux dernières décennies : il était de 18 p. 100 en 1975, il est de 24 p. 100 en 1999. La structure des échanges de la France montre qu’une grande part de ceux-ci se font avec ses partenaires de l’Union européenne, et que la part qui s’effectue avec les pays dont on redoute la concurrence reste faible : en ce qui concerne les pays asiatiques, la balance commerciale est excédentaire. La France s’accommode donc bien des contraintes et des effets de la mondialisation.
La concurrence des pays émergents n’est, en réalité, le fait que d’un nombre réduit de pays et les contraintes ne sont pas homogènes, tant au niveau géographique, qu’au niveau des secteurs d’activité concernés. À travers l’échange international, ce sont surtout les régions très spécialisées (textile des Vosges et du Nord) et les industries employant un fort pourcentage de main-d’œuvre peu qualifiée qui souffrent de ce type de concurrence.
5 LA MONDIALISATION CULTURELLE ET LES MOUVEMENTS « ANTI-MONDIALISATION »
5.1 Homogénéisation de la culture mondiale
La mondialisation se manifeste aussi sur le plan culturel par une certaine homogénéisation des modes de consommation, ce que les sociologues appellent parfois par dérision la macdonalisation du monde (du nom des restaurants rapides McDonald qui se sont implantés dans pratiquement tous les pays du monde). La jeunesse voit les mêmes films, danse sur les mêmes rythmes, au moins dans la partie occidentalisée du monde. Des canons communs tendent à devenir une norme, où certains dénoncent une « américanisation » des sociétés contemporaines, qui serait caractérisée par exemple par la consommation de films d’Hollywood, l’adoption d’une sous-culture anglo-saxonne et une pratique instrumentale de la langue anglaise. D’autre sociologues montrent d’une manière plus subtile que l’homogénéisation s’accompagne parallèlement d’éléments de différenciation et de revendications identitaires (ethniques, religieuses, régionales…) qui méritent d’être relevées, sans y voir nécessairement des tendances à l’intégrisme (J. Cesari).
5.2 La naissance des mouvements anti-mondialisation
Le processus de mondialisation est l’objet de critiques de nature et d’origine très diverses : les religions renâclent devant une idéologie universaliste qui leur échappe, les syndicats craignent des disparitions d’emplois, les nationalistes redoutent des pertes de « souveraineté » au profit d’entités politiques supérieures, les mouvements écologistes voient dans l’influence mondialiste un risque pour l’équilibre de la planète. Toutes ces mouvements diffus d’opposition, déjà présents lors des négociations sur le traité de l’Alena en 1992-1993, ou lors de l’adoption du traité de Maastricht en Europe en 1992, se sont retrouvés réunis, en compagnie de mouvements politiques plus classiques, dans de grandes manifestations, lors des assemblées de la Banque Mondiale. Les scènes d’émeute lors de la Conférence de l’OMC convoquée à Seattle en novembre-décembre 1999 ont marqué l’opinion publique et l’échec et le report de cette Conférence ont semblé donner raison aux groupes anti-mondialisation. Cependant ces mouvements, tiraillés entre des tendances idéologiques diverses, semblent avoir des difficultés à articuler un plan de propositions concrètes. Leur opposition et leurs manifestations, bien coordonnée sur le plan logistique, grâce aux moyens d’information et de communication, offre en fait, un nouveau témoignage de la mondialisation en cours, témoignage renforcé par la récente tenue (janvier 2001) du premier Forum social mondial qui s’est tenu à Porto Alegre au Brésil, réunion au cours de laquelle l’ensemble des opposants à une mondialisation par trop libérale ont pu faire contrepoids aux global leaders réunis au même moment à Davos en Suisse.
6 LE NÉCESSAIRE CONTRÔLE DE LA MONDIALISATION
La mondialisation, en tant que telle, ne suffit pas à expliquer les maux dont souffrent les économies modernes. L’importance de ce mouvement comporte cependant des dangers qu’il ne faut pas négliger. Certaines craintes sont légitimes : ce sont les mêmes qui s’adressent aux excès des politiques libérales fondées sur la déréglementation et la privatisation de biens publics naturels ou patrimoniaux. Une étude de la Banque mondiale sur la pauvreté (2000) montre par exemple que la tendance actuelle de l’économie mondiale va dans le sens d’une augmentation des inégalités entre pays industriels et pays sous-développés. A l’intérieur des pays sous-développés eux-mêmes, des disparités économiques et sociales sont de plus en plus évidentes. Ces phénomènes de concentration de la richesse, déjà annoncés par les auteurs marxistes, sont maintenant admis par tous les économistes. L’objectif doit donc être d’atténuer ou même de réduire ces contrastes par des politiques sociales ou des politiques de redistribution (par exemple, les fonds structurels de l’Union européenne, qui ont donné des résultats spectaculaires).
L’accord multilatéral portant sur les investissements (AMI), négocié en 1999 sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), est une autre illustration des dangers d’une mondialisation non contrôlée. Ce projet avait pour objet de consacrer l’absolue priorité de l’investissement international direct par rapport au droit international des affaires et même par rapport au droit national. Il a dû être retiré sous la pression des Etats et en raison des représentations faites par des intellectuels et certains groupes d’action, dont en France l’Association pour la taxation des transactions financières (ATTAC). Ces exemples montrent que le processus de mondialisation, auquel l’époque ne peut échapper sous peine de régression, doit être surveillé et contrôlé, chaque fois que ses manifestations sont de nature à porter atteinte à l’exercice des droits fondamentaux des individus et des peuples.

Posts les plus consultés de ce blog

La division du travail chez Karl Marx

La division du travail chez Karl MARX. L'analyse de la division du travail tiens également une place particulière dans la pensée marxienne. Elle est un moyen de faire du profit et sert le dessein (projet) de la classe dominante, mais elle conduit aussi à la séparation entre les hommes, à la constitution des classes et à leurs conflits. MARX cherchera dans le capital à retracer l'histoire de la division capitaliste du travail. Il part de la période manufacturière, car la manufacture est le véritable point de départ de la production capitaliste, en ce sens qu'elle va rassembler les ouvriers dans le même espace de travail. Si l'habilitée de métier reste le fondement de la manufacture, chaque ouvrier y occupe une fonction parcellaire. Le développement de la division du travail dans la période manufacturière se traduit pas une subdivision des opérations productives, par une parcellisation des fon...

Traiter les faits sociaux comme des choses (Fabien Bekale)

          Dans Les règles de la méthode sociologique, œuvre écrite en 1895 par Emile Durkheim, sociologue français du XIXe siècle, l’auteur résume l’objet de la sociologie et la méthode à appliquer pour pratiquer cette discipline. Dans cet ouvrage, le projet sociologique de l’auteur, considéré comme le père de la sociologie française, apparait clairement. Il cherche en effet à fonder la sociologie comme une science nouvelle et à l’établir institutionnellement ; ce livre répond à cette ambition ou il définit les règles méthodologiques à suivre pour une étude sociologique. La première règle et la plus fondamentale résulte de l’idée selon laquelle « il faut traiter les faits sociaux comme les choses ». Il s’agira d’abord de définir le concept de fait social...

Classe sociale, Marx, Weber et Bourdieu.

Karl Marx 1818 - 1883 Grâce à son analyse de la société industrialisée et capitaliste, Karl Marx a mis en évidence l’existence de classes sociales, groupements d’individus partageant des intérets communs. Les deux principales classes sont la bourgeoisie capitaliste : personnes disposant du capital et propriétaires des moyens de productions, qui ont donc le pouvoir d’embaucher les prolétaires : personnes n’ayant que leur force de travail et qui sont exploitées et dominées économiquement par les bourgeois. Ces deux classes opposées et irréductibles constituent une approche bipolaire de la société. Marx distingue donc une classe sociale grâce à trois critères : sa place dans les rapports de production (« en soi »), le sentiment d’appartenance à un groupe ayant des intérets communs ou conscience de classe (« pour soi ») et les rapports conflictuels qu’elle entretient avec les autres classes. Enfin, Marx élabore son analyse selon une démarche holiste d’après laquelle le comportement des ind...

Trois critères de la classe sociale selon Karl Marx

Trois critères de la classe sociale selon Karl Marx -La place dans les rapports de productions. Les membres d'une même classe partagent la même place dans les rapports de production c'est à dire avec un rôle particulier des productions des circulations et de la distribution des richesses. -La participation aux antagonismes sociaux, car selon Marx "c'est dans la lutte et par elle que les classes se constituent, se structurent, prennent conscience d'ellesmêmes". -La conscience de classe est un sentiment d'appartenance à une classe sociale liée à l'existence d'intérêts communs. Surtout la conscience de classe des prolétaires qui se développera avec la lutte des classes. La pensée de Marx est une interprétation du caractère contradictoire et antagoniste de la société capitaliste. Il existe en effet deux (2) formes de contradictions: -entre la force de production et rapport de production: la bourge...

Emile Durkheim déterminisme ou holisme?

Durkheim le déterministe ? Durkheim l'holiste ? Durkheim fut à maintes reprises accusé de déterminisme et d'holisme (Raymond Aron en particulier attaquerait l'holisme supposé de Durkheim) à cause de ses positions et sa méthodologie. D'autres critiques vont aussi loin en affirmant que Durkheim est anti-individuel, et qu'il ne laisse aucune place à l'individu dans ses théories. Dans ce sens, Durkheim est souvent comparé à Max Weber, qui privilégie l'individu dans ses analyses87. En effet, quelle liberté reste-t-il à l'homme dans l'œuvre de Durkheim ? Quelle est la place de l'individu dans l'œuvre de Durkheim ? Bien que Durkheim tentait d'expliquer les phénomènes sociaux à partir des collectivités, il laisse bien la place aux individus et au libre arbitre dans ses théories et ses analyses, et les accusations de déterminisme ou de holisme manquent de prendre en compte et interpr...