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Utopistes

Utopistes

Utopistes (du grec ou, préfixe privatif et de topos « lieu », signifiant « ce qui n'est d'aucun lieu »), adeptes d'un concept d'une société idéale.
Le terme « utopie » fut forgé par Thomas More dans son ouvrage l'Utopie (1516), mais la construction imaginaire d'une société idéale se retrouve déjà chez des philosophes grecs de l'Antiquité. Dans la société imaginée par Thomas More, la rationalisation et la planification sont poussées à l'extrême. More décrit une société dépourvue des inégalités de statut et d'argent, caractéristique de l'Angleterre des Tudor. Aujourd'hui, le concept d'utopie a perdu son caractère totalitaire et sa connotation péjorative, grâce notamment au philosophe allemand Ernst Bloch (1885-1977), qui considérait que dans une perspective marxiste, le besoin d'imaginer de nouvelles perspectives sociales ne relève pas de l'aliénation mais procède d'une conscience réflexive de l'Homme. L'ouvrage de René Dumont, l'Utopie ou la mort (1973), porte la marque de cette conception. L'auteur qui a le plus marqué l'évolution du concept au XXe siècle est Karl Mannheim, qui démontra dans Idéologie et Utopie (1927) que les deux termes ont pour point commun la volonté de transcender l'être-là humain, le quotidien vécu ; cependant, l'idéologie est une conscience dont la fonction est conservatrice, alors que celle de l'utopie est révolutionnaire. L'une et l'autre sont des « fausses consciences », de pures évasions hors des sociétés vivantes.
On peut établir une typologie des utopies rêvées et des utopies réalisées. Dans les premières figurent les utopies « positives », comme celle de la République de Platon, qui décrit la société idéalisée de Sparte et ses principes dirigistes et ascétiques, ainsi que l'île d'Utopie de More, où on retrouve à la fois l'idéal d'une rationalité sociale absolue et l'éloge de l'esclavage et du colonialisme, qui étaient tous deux largement admis dans la société du XVIe siècle. Parmi les utopies « négatives », ou « contre-utopies », on peut citer le roman de George Orwell, 1984 (1949), qui dépeint un univers totalitaire dominé par un remaniement constant du passé, et le Meilleur des mondes (1932) d'Aldous Huxley.
L'utopie n'a pas nourri le seul royaume des idées. De vraies communautés utopiques ont été fondées tout au long de l'histoire, comme l'attestent les communautés esséniennes, les cités modèles industrielles de Robert Owen et les kibboutz en Israël. Parmi des expériences plus anciennes figurent l'État des Incas au Mexique et l'État des jésuites au Paraguay. Dans le premier, on trouvait une société essentiellement hiérarchique, ignorant l'égalité, mais aussi la faim et l'abandon des vieillards, reposant aussi sur un mépris complet de la femme. L'État gérait toutes les situations et un observateur chrétien de l'Empire inca, le père José de Acosta, relevait qu'aucune charité n'y était nécessaire car l'État s'occupait de tout.
À la lumière des expériences totalitaires du XXe siècle, les utopies apparaissent comme résolument dangereuses et, à l'exception de certains partis extrémistes, aucune force politique ne souhaite leur réalisation.

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