Structuralisme (généralisé)
Explication: « Le structuralisme n'est pas une école de pensée facilement identifiable. À la fin des années 1950, la référence au concept de structure est générale dans le champ des sciences humaines, et trois colloques aux titres évocateurs attestent à la fois de cette généralisation de la notion, de sa dispersion... et de son imprécision : en 1959, Sens et usages du terme structure (R. Bastide dir., Mouton, 1962), en 1957, Notion de structure et structure de la connaissance (Albin Michel, 1957) et, en 1959, Entretiens sur les notions de genèse et de structure (Colloque de Cerisy, Mouton, 1965). Ils mobilisent alors savants des sciences de la nature, sociologues, anthropologues, psychologues, économistes, historiens, théoriciens de la littérature, linguistes et philosophes. Chaque discipline a pu reconnaître, sur les bases de son propre développement, un intérêt plus ou moins central pour le concept de structure qu'elle s'est efforcée de définir pour son propre compte (en biologie, en sociologie, en mathématiques, en anthropologie, en linguistique...). Ces thématisations de la "structure" n'ont pas eu lieu en même temps, elles ne sont pas nécessairement isomorphes, elles relèvent de types de rationalité hétérogènes. Enfin, elles ne présupposent pas une "essence" du structuralisme qui leur serait commune. Or ce qu'on appelle couramment "structuralisme" est précisément ce qui laisse poindre à la fin des années 1950 l'espoir d'une unité des travaux en sciences humaines, et même, chez certains, la perspective d'une recomposition majeure des savoirs, par-delà les coupures entre culture scientifique et culture lettrée ou même entre nature et culture. Ce double espoir a sans conteste affecté chacune des disciplines concernées, et orienté – un temps au moins – leur évolution. Il leur a permis d'envisager d'autres relations avec les disciplines voisines. Pour certaines, il les a conduites à projeter leur avenir à partir des quelques lignes que Ferdinand de Saussure consacre à la sémiologie dans le Cours de linguistique générale, lorsqu'il évoque "une science générale des signes au sein de la vie sociale". Cette science "projetée" a déjà des attaches paradoxales avec la linguistique : elle est, selon Saussure lui-même, un horizon dont la linguistique reste pourtant l'esquisse la plus achevée. On peut penser que ces attaches paradoxales se répercutent et se démultiplient dans ce qu'on peut appeler le "structuralisme généralisé". Quel que soit le jugement qu'on puisse porter sur ce "moment" structuraliste, on peut dire avec la distance de l'historien qu'il a constitué un effort désordonné mais intense de rapprochement entre les sciences humaines et la philosophie. » (Encyclopædia Universalis, 2004, article « Structuralisme »)